Faire du temps, et non de la lenteur, un vecteur de croissance : beaucoup d’acteurs de l’économie classique, à commencer par la restauration, l’ont adopté comme credo.
Dans les années 80 en Italie, Carlo Petrini invente le concept de « slow food », en réponse au fast food, pour proposer une nourriture de qualité tout en intégrant des producteurs locaux. La philosophie au cœur de ce mouvement est celle du plaisir, et pour cela, il faut prendre son temps pour déguster ! Au cœur de la « slow food » on retrouve la convivialité, autour du repas commun (« convivum »). Le moment du repas est remis à l’honneur et retrouve une de ses fonctions principales : l’échange et le partage. Au Danemark où la nuit n’en finit pas en hiver, toute notion du temps est perdue et c’est dans le « hygge » que les habitants trouvent leur bonheur : profiter des petits plaisirs de la vie avec les personnes qui leur sont chères, le dîner entre amis étant un moment phare du « hygge ».
Si la slow food a été pionnière dans cette nouvelle tendance « slow », cette dernière s’est développée dans de nombreux secteurs. Depuis quelques décennies, la mode ne suit plus les saisons avec deux collections « automne-hiver » et « printemps-été » mais propose de nouveaux articles toutes les deux semaines, dans une course effrénée contre le démodé. Mais quand jeter n’est plus vraiment à la mode, la mode se met au recyclage ! En ce moment, la mode passe progressivement du cycle « acheter/ porter/ jeter » au cycle « réparer/ transformer/ recycler ».
Selon une étude d’Opinion Way en 2014, 86% des Français aiment prendre leur temps avant d’acheter et considèrent que cela amplifie leur plaisir. On y revient : le slow est intrinsèquement lié au plaisir.
De façon plus générale, le « slow business » ce n’est pas travailler moins mais travailler mieux, c’est replacer le bien être et les relations entre collaborateurs au cœur des activités, que ce soit la mode, la restauration ou bien d’autres secteurs. Certaines entreprises (entre 10 et 15% des entreprises aux Etats-Unis !) ont adopté la logique ROWE (Results-Only Work Environment), qui laisse les employés maîtres de leur agenda, tant que le résultat est au rendez-vous. Le « slow business », ce n’est pas l’éloge de la lenteur, mais celui de l’équilibre, notamment entre vie personnelle et vie professionnelle.
Le temps c’est de l’argent : nous savons depuis bien longtemps que le temps est rare et précieux. Ce que le temps façonne prend de la valeur, or nous voyons encore le temps comme un ennemi, que nous cherchons à contrôler à tout prix. Le temps est pourtant indissociable du bien-être : il faut réconcilier le temps économique et le temps humain, qui sont brouillés depuis trop d’années !
Fanny Pignères