Peux-tu nous expliquer en quelques mots ce que fait Ares et le principe de l’insertion ?
Ares est une association dont la vocation est de permettre aux personnes en situation vulnérable deretrouver autonomie et dignité par le travail. Pour ce faire, nous créons des entreprises tremplin dans des métiers aussi divers que la logistique e-commerce, le transport écologique de marchandises, l’économie circulaire ou les services numériques.
Notre particularité est de recruter des personnes avec des difficultés sociales et professionnelles pour leur permettre de reprendre confiance en elles au sein de nos entreprises. Parallèlement, elles bénéficient d’un accompagnement personnalisé pour régler les problématiques d’urgence (logement, santé, endettement,…), travailler leur projet professionnel et enfin les aider à retrouver un emploi stable. Ares aujourd’hui c’est 10 entreprises tremplin, 21 millions d’euros d’activité pour près de 600 collaborateurs.
Comme tu le sais le thème de notre newsletter cette fois-ci est le temps. Selon toi, dans quelle mesure la notion de temps est-elle importante dans l’insertion et pour quelles raisons ?
La question du temps est une notion centrale dans le parcours de réinsertion. L’Abbé Pierre disait à ce sujet qu’il faut autant de temps pour sortir de l’exclusion qu’on en a mis pour y plonger. Le parcours d’insertion doit constituer un moment de respiration pour les personnes que nous accueillons. Pouvoir retrouver du souffle, pour se reconstruire et reprendre confiance en soi. Dans l’insertion il faut ainsi être capable de s’adapter au rythme de chaque personne. Mais a contrario, c’est aussi un moment de changement, de transformation, de remise en marche qui suppose de poser des jalons et les réévaluer régulièrement. Donner du rythme pour permettre à la personne de s’inscrire dans une dynamique de progrès. Chez Ares, nous avons ainsi des rendez-vous formels tous les trois mois pour faire une évaluation, redéfinir les objectifs avec chaque personne.
Par ailleurs, l’insertion par le travail est réglementée et le ministère de l’emploi limite à deux années les temps de parcours. Si le passage à Ares est en moyenne d’une grosse année, cela arrive aussi que des personnes aient besoin de plus de temps que ce que nous sommes capables de leur apporter. C’est pour ça que nous travaillons avec certains partenaires, comme la Bergerie de Berdine, qui accueille les personnes de manière inconditionnelle sans contraintes de temps. Il y a des personnes qui y restent 5 années, 10 et parfois plus tant les blessures de vie peuvent nécessiter un temps long pour se cicatriser.
Enfin, cette notion de temps renvoie aussi à la qualité de l’insertion. L’objectif est que la personne n’ait plus besoin de soutien une fois passée par Ares. Il vaut donc mieux investir plus de temps et plus de moyens sur le moment pour que l’insertion soit réellement durable.
Donner du temps donc, donner du rythme aussi, sont deux principes fondamentaux du parcours d’insertion. Un équilibre subtil à trouver tant la situation, les enjeux et le rapport au temps de chaque personne accueillie sont uniques.
Dans le parcours d’insertion, quelles sont les choses qui prennent le plus de temps ? Est-ce qu’il y a des choses pour lesquelles le temps est incompressible, où même si vous vouliez aller plus vite vous ne pourriez pas ?
C’est le temps nécessaire pour construire le lien de confiance. Un temps par nature incompressible. Or on ne fait rien sans avoir restauré la confiance.
Toi qui es multi-entrepreneur au sein d’Ares et qui mène toujours de nombreux projets en parallèle, comment est-ce que tu gères cette notion au quotidien ? As-tu l’impression d’avoir assez de temps, y aurait-il des choses pour lesquelles tu aimerais en avoir plus ?
Je ne suis pas sûr d’être exemplaire sur cette question même si c’est pour moi un sujet de préoccupation quotidien et ce à de nombreux égards. Il y a plusieurs notions de temps à gérer, pour lesquelles chaque fois un équilibre est à trouver : l’équilibre temps professionnel/temps personnel, l’équilibre temps de production/temps de réflexion, le temps des projets, le temps de la culture d’entreprise, des équipes et des personnes, etc.
Ainsi la notion de temps traverse tout et doit être un sujet de préoccupation majeur, que ce soit pour les collaborateurs, pour l’efficacité des projets, etc. Il faut trouver un rythme pour tout, la question du temps ou plutôt des temps est centrale, elle me traverse, même si je ne suis pas encore sûr d’avoir trouvé tous mes équilibres.