Dans le milieu des start-ups aux Etats-Unis, et notamment quand celles-ci ont été créées par des jeunes (les « Millennials »), il semble que le mot d’ordre est d’ « échouer rapidement » (fail fast). La recommandation d’Echouer Rapidement n’est pas propre aux Etats-Unis, la logique étant qu’il vaut mieux au plus vite tester la viabilité d’une entreprise avant de s’engager trop en avant et d’avoir déjà perdu de l’argent quand cesse l’aventure ou d’être trop impliqué pour pouvoir couper facilement le cordon ombilical. Cependant, les Millennials américains en sont particulièrement friands car il y a chez la plupart – en tout cas chez ceux avec lesquels j’ai travaillé ces dernières années – une sorte de frénésie à accumuler des expériences même courtes. C’est un mode de fonctionnement probablement différent de celui d’autres générations, et il convient effectivement de se demander si malgré la liste impressionnante d’expériences accumulées en un temps-record (notamment par rapport à des gens plus âgés), il y a eu assez de « profondeur » pour vraiment capter, si on peut dire, la valeur de ces expériences et pouvoir en profiter à plein. Ainsi, le « slow » aurait des vertus dans ce cas.
La question « slow vs. fast » se pose aussi de manière intéressante dans le domaine de l’alimentation et de la nutrition. L’approche de la nourriture a beaucoup changé aux USA depuis bientôt 20 ans que j’y habite. Le mouvement « slow food » a certainement ses adeptes et plus généralement, il y a une prise de conscience de l’importance du « bien manger », notamment à cause de taux de prévalence, records pour un pays industrialisé, d’obésité, tension élevée, et diabète. En plus de changer ce que l’on mange (plus de fruits et légumes, moins de graisses, et de moins grandes quantités), la manière dont les repas sont consommés est aussi remise en question. Les restaurants fast food ne sont certes pas près de disparaître (d’ailleurs, des fast foods servant de la nourriture plus équilibrée ont fait leur apparition, certains rencontrant beaucoup de succès comme Sweetgreen ou b.good) mais il est de plus en plus question de « dîner en famille », tradition qui s’est perdue au fil du temps dans beaucoup de foyers américains où il n’est pas rare que chaque membre de la famille se dirige vers le frigo à l’heure du dîner pour préparer ce dont il ou elle a envie. Et le dîner en famille veut dire aussi passer plus de temps ensemble et apprécier ces moments – donc, plus de « slow » et moins de « fast ».
Philippe Taieb – phitaieb@gmail.com